Elmostafa Hamdouche conseiller juridique au sein du cabinet Westfield Morocco
« Se réunir est un début, rester ensemble est un progrès, travailler ensemble est la réussite ». En effet, la notion de groupe de sociétés trouve son origine dans l’intention d’assurer une harmonie juridique, économique et financière au sein d’un ensemble de sociétés formant un groupe structuré autour de certains liens financiers ou économiques, et ce pour aboutir à un fonctionnement efficace et une pérennité de travail pour les composantes de ce groupe.
Ainsi, le groupe des sociétés peut être le résultat de la pratique des affaires, à travers l’émergence d’une société centrale qui dispose de participations directes ou indirectes, ou qui exerce un contrôle de droit ou de fait sur deux ou plusieurs autres sociétés, juridiquement autonomes. Comme il peut être le fruit d’une stratégie préalable d’une société qui crée des filiales ou sous-filiales pour étendre son activité et contribuer à son
épanouissement.
Le groupe de société est une notion économique et pragmatique, qui ne trouve pas de fondement juridique ou législatif particulier. Ainsi, chaque branche de droit apprécie la notion selon ses enjeux et ses intérêts. De ce fait, en droit des sociétés, le législateur analyse la notion de groupe en se référant aux notions de participations et de contrôle, alors qu’en droit de la concurrence le contrôle peut être de droit ou de fait, il en est de même du fisc qui analyse la notion selon sa politique …
Il en résulte que le groupe de société, n’est pas doté d’une personnalité juridique propre. Il est l’expression économique et pragmatique de ses composantes.
Néanmoins, plusieurs techniques juridiques sont utilisées pour contribuer au développement et à l’épanouissement du groupe. Ainsi, à titre d’illustration, la société holding est une société qui a pour objectif primordial, de réunir des actionnaires qui souhaitent prendre des participations dans des sociétés détenues par celle-ci, afin d’assurer une unité stratégique de décision et une harmonie financière et économique au sein du groupe.
Les Holdings recourent toujours à des techniques juridiques et des mécanismes qui facilitent et améliorent le fonctionnement du groupe. Parmi ces mécanismes, on trouve les conventions intra-groupes. Ainsi, les sociétés du groupe, ayant des dirigeants communs, peuvent conclure entre elles, quelque soit la forme, des conventions diverses (Emprunts, engagements …). Parmi ces conventions, on trouve la convention de Cashpooling dite aussi
convention de trésorerie.
La convention de cashpooling est une convention qui permet d’assurer « une gestion centralisée des comptes des sociétés ». Sa mise en place consiste pour les sociétés du groupe en deux opérations : remonter leur solde créditeur vers un compte commun dite compte centralisateur (Master Account), d’une structure centralisatrice (Société Pivot). Ou si elles disposeront d’un solde débiteur c’est la structure centralisatrice, qui procède à
redescendre la trésorerie afin de rétablir un solde prédéfini dans la convention.
En règle générale, le Cashpooling est une technique juridique et financière, qui permet de regrouper les soldes créditeurs et débiteurs des sociétés formant le groupe, au sein d’un seul compte, pour assurer un rééquilibre dans leurs résultats financiers en gérant les excédents et les déficits des ces dernières, à travers des mouvements de Down Stream ou de Up Stream.
Comme tout mécanisme juridique et financier, le Cashpooling présente des avantages et des inconvénients.
Notre problématique sera donc de savoir : Quel intérêt présente la Cashpooling par rapport aux autres mécanismes de gestion financières au sein des groupes de sociétés ?
Pour répondre à ladite problématique, nous proposons d’analyser dans un premier temps l’architecture du cashpooling (I), avant de s’intéresser à l’esprit de cette technique de gestion financière et juridique (II).
I- L’architecture du Cashpooling :
Par dérogation au principe du monopole bancaire, l’article 18 de la loi bancaire N°103.12, autorise toute Société de procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou indirectement, des liens de capital conférant à l’une d’elles un pouvoir de contrôle effectif, sur les autres sociétés. En se basant sur cet article, nous allons essayer de relever dans un premier temps les conditions de la mise en œuvre d’une convention de cashpooling (1), avant de décortiquer les différents modes de ce
mécanisme juridique et financier (2).
1- Les Conditions de mise en œuvre du Cashpooling :
En effet, trois conditions cumulatives sont indispensables, afin de procéder à la réalisation d’une convention de trésorerie. Tout d’abord, il faut l’existence d’un groupe de société. Ensuite, il faut que l’opération en cause soit une opération de trésorerie. Et enfin, il faut l’existence d’une convention écrite.
Premièrement concernant la notion de groupe de société, l’article 18 de la loi 103.12 précédent, utilise le terme de contrôle effectif exercé par l’une des sociétés ayant des liens de capital sur les autres. Ce contrôle peut donc être soit un contrôle de droit soit un contrôle de fait. Il en est ainsi d’une société qui ne possède pas plus de 50% des actions, mais qui détermine la stratégie de plusieurs sociétés, à travers un concert entre des
actionnaires minoritaires, ou car les autres actionnaires possèdent moins d’actions qu’elle. Il en résulte que le nombre des actions détenues n’est pas le critère déterminant pour la réalisation d’une convention de trésorerie, il suffit que le contrôle exercé soit un contrôle effectif qui provient d’autres indications.
De même, selon la doctrine, l’utilisation de la notion des liens de capital exclut du champ d’application des conventions de cashpooling les groupements d’intérêt économique , qui ne sont basés que sur des liens contractuels, et non pas économiques ou financiers. Cependant, en pratique, les sociétés formant un groupe peuvent convenir qu’un GIE peut jouer le rôle de l’entité centralisatrice. D’ailleurs, ceci paraît logique dans la mesure où l’intérêt d’un GIE est de faciliter la mise en commun de certains moyens financiers ou matériels afin de réaliser des économies.
Cela s’avère en cohérence avec l’esprit du mécanisme du Cashpooling déjà évoqué ci-dessus.
Deuxièmement, il faut que la convention de cashpooling porte uniquement sur des opérations de trésorerie. Cette notion d’opération de trésorerie s’apprécie différemment selon deux courants doctrinaux. Ainsi d’une part, selon certains une opération de trésorerie doit se limiter aux liquidités à savoir l’argent disponible ainsi que les placements à court ou moyen terme. Alors que selon d’autres, les opérations de trésorerie englobent
également les crédits et les placements à long terme.
Par ailleurs, selon un éminent auteur, une opération de trésorerie est opération à court terme, mais tant qu’il n’y a aucune définition à cet égard, rien n’interdit de l’inscrire dans le moyen ou le long terme.
Enfin, la dernière condition se rapporte à l’existence d’une convention de centralisation de trésorerie (Cashpooling). Il doit s’agir d’une convention unique pour l’ensemble du groupe qui permet de centraliser le flux financier et les opérations de trésorerie au sein d’une seule entité centralisatrice. Celle-ci peut être la Holding ou une société pivot. Elle joue ainsi le rôle d’une banque de centralisation pour toutes les sociétés formant le groupe. L’objectif primordial est de gérer les excédents et les déficits de l’ensemble des sociétés par l’entité centralisatrice, en assurant un équilibre financier au sein de toutes les sociétés. Cette convention est désignée par le terme « Omnium ».
Toutefois, rien n’interdit de confier la mission de centralisation à une banque, qui fera partie ainsi de la convention de centralisation, et assurera la gestion d’un Master Account, dans lequel seront centralisées et consolidés tous les flux financiers des sociétés appartenant au groupe en cause. La convention de centralisation ou de Cashpooling, permettra de fixer les modalités de cette centralisation selon les besoins et conformément à l’autonomie de volonté des Parties contractantes. Elle fixera également les modes de cette technique financière et juridique que nus allons présenter ci-dessous.
2- Les modes de ce mécanisme juridique et financier :
Avant de traiter les différents modes de centralisation, il est indispensable de noter que la rédaction attentive de la convention est importante, ainsi que la confiance entre les sociétés envers l’entité centralisatrice. Car celle-ci ne doit pas utiliser le compte commun pour répondre à ses propres besoins, ou pour désintéresser ses créanciers. Raison pour laquelle, il est préférable que le choix de l’entité centralisatrice porte sur une holding,
ou une banque tierce aux membres du groupe.
Toutefois, ce rôle de centralisation ne se réalise pas sans contrepartie ou à titre gratuit. Ainsi comme dans un contrat de prêt, la convention de centralisation doit prévoir une rémunération des prestations réalisées. Cette rémunération doit être précise et équilibrée, afin d’éviter de requalifier la convention en un acte anormal de gestion.
Quant aux types ou modalités de centralisation, on distingue deux principales modalités ou types de cashpooling : La Cashpooling physique et virtuel.
La Cashpooling physique permet de transmettre les fonds d’un compte à l’autre, à travers des virements physiques et réelles. Il faut à cet effet l’existence d’une convention entre l’entité centralisatrice et chaque filiale, qui autorise ainsi cette entité à programmer des opérations de transferts des fonds. Ce mode peut se réaliser selon trois manières :
Le ZBA (Zero Balancing Account) : Ce mode a pour objectif de transférer la totalité du solde de trésorerie des sociétés du groupe au compte commun, et de ne leur laisser en trésorerie que des montants minimums pour faire fasse à leurs dettes. Autrement dit, il consiste en une remise à Zero quotidienne des soldes des filiales. Le mode ZBA présente l’avantage d’avoir une vision globale de la trésorerie et la situation financière du groupe. Cependant il présente l’inconvénient de porter atteinte en quelque sorte à l’autonomie financière des
filiales ;
Le TBA (Target Balancing Account) : A cet égard, la convention détermine un seuil créditeur minimal au-delà duquel les comptes créditeurs secondaires seront nivelés. Et les comptes débiteurs seront toujours apurés. C’est un mécanisme qui permet de gérer les excédents des filiales pour répondre aux déficits des autres ;
Le FBA (Fork Balancing Account) : Ce mode signifie que tous les comptes créditeurs ou débiteurs, doivent être nivelés selon un seuil prédéfinit. Quant au Cashpooling notionnel ou virtuel, comme son nom l’indique il permet une centralisation virtuelle sans transfert réel des fonds. Seul un calcul virtuel qui permet de retracer ladite centralisation et de décrire les
différents mouvements de remontée et de redescentes des trésoreries des sociétés du groupe. Ledit mode permet à l’entité centralisatrice, ou le cas échéant la banque, de calculer les agios si le résultat global s’avère débiteur, et de calculer les intérêts s’il avère créditeur. Ainsi on regroupe les comptes bancaires des filiales uniquement virtuellement et dans le seul objectif de calculer le montant des intérêts dus.
II- L’esprit de la technique financière et juridique de centralisation :
Afin d’analyser l’esprit de l’institution du Cashpooling, il est intéressant de s’attacher à ses avantages et ses mérites (1), avant de relever les limites qui peuvent la rendre inadéquate dans certaines circonstances (2).
1- Les mérites du Cashpooling :
La centralisation de trésorerie présente de nombreux avantages, que nous allons essayer de démontrer comme suit :
Sur le plan de financement : le Cashpooling constitue une meilleure alternative au financement bancaire ou même à une opération d’augmentation de capital nécessitant des frais exorbitants et des formalités lourdes. Ainsi, le besoin de crédit ou de financement de l’une des filiales sera assuré et apuré par les excédents réalisés par les autres et vice versa. Ce qui traduit une scène de solidarité financière entre les membres du groupe qui leur permet de gérer de manière interne leurs besoins de liquidités et de financement.
De même, le mécanisme de cashpooling permet aux sociétés du groupe d’économiser plusieurs frais :
Commissions bancaires, frais d’intermédiaires … Ainsi, à titre d’exemple, une société ne faisant pas partie d’une convention de centralisation, sera soumise à un taux de placement pour ses comptes créditeurs, diminué d’une marge. Et si elle conclu un emprunt elle sera ainsi soumise à un taux d’intérêt de marché augmenté d’une marge. Par contre, dans le cas d’une centralisation ces marges étant supprimées, la société réalisera des économies importantes en termes de placement et de taux d’intérêt également.
Sur le plan de force : En effet, la centralisation aboutit à un effet de masse, qui permet de regrouper la trésorerie des filiales au sein d’un Master Account, géré et détenu par l’entité centralisatrice. De ce fait, celle-ci sera un bon interlocuteur au nom du groupe avec les établissements financiers ainsi que sur les marchés financiers. Le poids financier sera plus important et permettra d’obtenir dans les relations économiques avec les tiers des conditions plus avantageuses qui améliorent la situation financière du groupe et optimisent sa gestion financière.
2- Les Limites du Cashpooling :
A l’instar de toute autre institution ou technique juridique et financière, la centralisation de trésorerie (Cashpooling), présente à la fois des avantages et des inconvénients. Ces inconvénients se manifestent au niveau de certains risques et limites qui peuvent la rendre inadéquate dans certaines circonstances.
a- Les limites et inconvénients :
En premier lieu, la centralisation de trésorerie peut s’avérer inapplicable voire imparfaite, dans certains cas, notamment dans les groupes de société structurés autour d’une politique de décentralisation. Ainsi dans certains cas, même appartenant à un même groupe, les filiales exercent des activités diverses et différentes, et se comportent d’une manière autonome et indépendante les unes par rapport aux autres, et par rapport à la
société mère également. Il en résulte que dans ce type de groupe, la convention de Cashpooling peut représenter une atteinte à cette autonomie et risque de dériver toute la politique de décentralisation du groupe.
En second lieu, un inconvénient majeur se présente lors de la mise en place d’une convention de centralisation de trésorerie, concernant la confiance et la crédibilité de l’entité centralisatrice. En effet, il faut s’assurer que l’entité centralisatrice ne pourra pas user de la technique pour protéger ses propres intérêts ou uniquement dans l’intérêt du groupe au détriment de celui des sociétés secondaires. Aussi, il faut que le compte commun soit inopposable et protégé contre les éventuelles poursuites des créanciers de la société pivot ou l’entité centralisatrice. En gros, cet élément de confiance est un élément indispensable pour préserver la sécurité de cette technique et s’assurer de son efficacité.
b- Les risques de la technique de centralisation :
Dans certaines circonstances, le Cashpooling peut être disqualifié d’une technique de centralisation à un acte susceptible de constituer une infraction ou de porter atteinte aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur. A cet égard, nous exposerons quatre situations : Le risque d’un abus de majorité, le risque d’un abus des biens sociaux, le risque d’un acte anormal de gestion, et le risque en cas de procédures collectives :
Le risque d’un abus de majorité :
En effet, un abus de majorité est constaté dans le cas de la réunion de deux conditions cumulatives : d’une part, l’atteinte portée à l’intérêt social, et d’autre part une rupture d’égalité entre les associés ou les actionnaires. La conclusion d’une convention de centralisation de trésorerie ne doit pas ainsi être prise dans l’unique dessin
de favoriser l’intérêt du groupe sur l’intérêt social des filiales, ou pour préserver les intérêts catégoriels des actionnaires majoritaires.
A cet effet nous pouvons relever certains indices ou présomptions d’abus de majorité, et d’atteinte à l’intérêt social des sociétés, en analysant les stipulation et l’esprit de chaque convention de Cashpooling. Ainsi par exemple, si la convention de Cashpooling prévoit des intérêts excessifs en faveur de la société centralisatrice, les juges peuvent caractériser un abus
Le risque d’un abus des biens sociaux :
L’article 384-3 de la loi 17.95 punit d’un emprisonnement d’un à six mois et/ou d’une amende de 100 000 à un million de dirhams, les dirigeants qui, de mauvaise foi, auront fait des biens ou du crédit de la société un usage qu’ils savaient contraire aux intérêts économiques de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement.
Il en résulte que la convention de centralisation de trésorerie risque d’être qualifiée d’un abus de biens sociaux, si elle a été prise d’une manière désavantageuse et contraire aux intérêts économiques de ou des filiales. Toutefois, dans certaines conditions la qualification d’abus de bien sociaux peut être écartée, notamment si la convention est justifiée par l’intérêt économique et financier commun dans le cadre de la politique du groupe.
Ceci a été affirmé par la jurisprudence française dans l’arrêt Rozenblum sous réserve de trois conditions :
La politique du groupe est commune et l’intérêt du groupe doit être économique financier ou social ;
Les concours ont été effectué avec une contrepartie, et en respectant l’équilibre des engagements respectifs des diverses sociétés concernées.
L’engagement de chaque société ne doit pas dépasser les possibilités financières de celle-ci.
Le risque en cas de procédures collectives :
Certes le groupe de société n’a pas de personnalité juridique propre. De ce fait, une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ne peut être invoquée à l’encontre du groupe. Néanmoins, si l’une des filiales du groupe se verra condamnée à l’ouverture d’une procédure collective, celle-ci peut être étendue : soit à l’ensemble des sociétés du groupe y compris la société mère, soit aux dirigeants sociaux. Premièrement extension de la procédure à l’ensemble du groupe : Cette possibilité est prévue notamment dans le cas d’une confusion de patrimoine entre la société en cessation de paiement et d’autres entreprises. Ainsi l’article 585 alinéa 1 du code de commerce marocain prévoit que
« La procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres entreprises par suite de
confusion de leur patrimoine avec celui de l’entreprise soumise à la procédure ou lorsqu’il s’agit d’une personne morale fictive ».
Néanmoins, dans l’affaire Métaleurop , il a été affirmé qu’une convention de trésorerie intra-groupe, même accompagnée d’échanges de personnels et d’avances de fonds ne caractérise pas des relations financières anormale constitutives d’une confusion de patrimoine entre les sociétés. Il faut en fait une véritable unité. Toutefois, selon la doctrine ledit arrêt n’exonère pas totalement la convention de Cashpooling, de l’application
de cette hypothèse de confusion, mais exclus seulement la qualification automatique. Raison pour laquelle, il vaut mieux veiller lors de la conclusion de la convention de centralisation de trésorerie à équilibrer la centralisation pour éviter une confusion et une unité des patrimoines.
Deuxièmement : extension de la procédure collective aux dirigeants sociaux :
Si le dirigeant commet l’une des fautes prévues à l’article 740 du Code de commerce, en plus d’engager sa responsabilité pour insuffisance d’actif, une procédure collective peut être déclarée à son encontre et sur son propre patrimoine. Parmi ces fautes on trouve le fait de « avoir fait des biens ou du crédit de la société un usage contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ».
Il en résulte que si la conclusion malaise d’une convention de centralisation entre une ou plusieurs filiales et la société mère conduit l’une de ces dernières à un état de cessation de paiement, les dirigeants sociaux peuvent engager leur responsabilité et subir ainsi l’ouverture d’une procédure collective sur leur propre patrimoine, si la faute ci-dessus est établit.
Le risque d’un acte anormal de gestion :
Pour qualifier une convention de centralisation de trésorerie d’acte anormale de gestion, le Conseil d’Etat français estime que
« les prêts à terme ou les avances à vue accordés sans intérêts par une entreprise au profit de tiers ne relèvent pas, en règle générale, d’une gestion commerciale normale, alors même que les sommes ainsi avancées seraient remboursables à tout moment, sauf s’il apparait qu’en consentant de tels avantages l’entreprise a agi dans son propre intérêt »
De l’avis précédé, on peut déduire que la convention de Cashpooling doit inévitablement prévoir une rémunération en faveur des sociétés créditrices et une commission pour l’entité centralisatrice. En veillant toutefois à assurer une égalité financière entre les sociétés créditrices et débitrices, sans enrichir les unes au détriment des autres. Ainsi selon la jurisprudence française l’absence de rémunération constitue une présomption d’un acte de gestion anormal.
Et même en prévoyant une rémunération, celle-ci ne doit pas être de nature à entraîner un déséquilibre de traitement. Pour éviter de tomber dans la qualification d’une rémunération déséquilibrée ou excessive, certains auteurs proposent d‘aligner au taux normal du marché.
En résumé on peut dire que la convention de garder un équilibre en fonction des conditions normales du marché : En rémunérant les sociétés créditrices dans les conditions au moins normales qu’elles pourraient obtenir en accordant un prêt à des tierces personnes, et en imposant aux sociétés débitrices des intérêts selon des taux ne dépassant pas les taux normaux imposés par les établissements de crédit.
Conclusion :
On guise de conclusion, on peut dire, que la technique de Cashpooling, constitue une technique juridique et financière adéquate dans les groupes ayant une politique commune et des liens très étroits, en l’occurrence les holdings et groupes familiaux.
Toutefois, rien n’empêche les autres groupes de recourir à ce mécanisme qui constitue une véritable alternative au crédit bancaire et aux opérations d’augmentation de capital, mais en veillant à une rédaction attentive de la convention de centralisation de trésorerie et en choisissant le mode le plus cohérent avec le fonctionnement et les spécificités du groupe en cause, pour éviter les éventuels risques liés à cette techniques et sus-indiqués.
Avant de conclure, nous pouvons poser une autre question relative à l’analyse de ce mécanisme juridique et financier à savoir : Dans quelle mesure la Fiducie peut constituer un moyen alternatif au Cashpooling ? Une question pertinente que nous pourrons analyser dans nos prochaines recherches.
Bibliographie :
Ouvrages :
« Traité marocain de droit des sociétés », Mohamed El mernisi, LexisNexis.
Francis Lefebvre, Charvériat, Couret, Janin, Mercadal et Zabala, Groupe de sociétés, éd. Francis Lefebvre, 2013 – 2014.
Hallouin, Groupes de sociétés – Centralisation de trésorerie, J. Cl Banque – Crédit – Bourse, Fasc.
Le Fur et Quiry, Finance d’entreprise, éd. Pierre Vernimmen, 2010.
Mémoires :
Léo Benoist « Cashpooling », Mémoire de stage Master, Sous la direction de M. Richard Marty Maitre de conférences des Universités, HDR Directeur du Master 2 professionnel de droit des affaires spécialité Banque et Bourse de l’université du Maine et Me Véronique Collin Associée, Département Finance et Projets – DLA Piper, p.20.
Jurisprudence :
Cass com. 19 Avril 2005, Affaire Métaleurop, n° 05-10.094.
Cass. Crim. 4 Février aff. Rozenblum, n°84-91.581 ; JCP G 1986, II, 20585, note W. Jean Didier.
Texte de lois :
Loi marocaine numéro 103.12 relative aux établissements de crédit et organismes assimilées.
Code de Commerce marocain : Article 585 et 740